Suite aux lois du Grenelle de l’environnement, un rapport d’évaluation affirme que le secteur du bâtiment représente plus de 42% de la consommation d’énergie finale en France. En réponse, le plan bâtiment du Grenelle prévoit une diminution de 38% de la consommation énergétique du parc bâti, d’ici 2020. Pour cela, les normes de construction se renforcent et projettent, à l’horizon 2012, que le standard de la construction neuve soit au moins équivalent aux normes des Bâtiments Basse Consommation. Dans cette démarche de gain en efficacité, la question de la thermique est au coeur de la problématique.
Or le choix d’un isolant n’est pas anodin. En plus de son efficacité thermique, il faut prendre en compte le procédé dont il est issu, les matières premières utilisées et ses techniques de mise en oeuvre. Ainsi, il doit pouvoir garantir des économies de chauffage, tout en étant lui‐même produit avec peu d’énergie. L’idéal étant évidemment d’utiliser le moins de matière pour arriver au même résultat. Pour cela une attention particulière doit être accordée à la compacité du bâti pour garantir une forme d’optimisation du bâtiment.

 Pourquoi et depuis quand … isolons nous ?

Si l’utilité de l’isolation peut, aujourd’hui, sembler évident, au milieu du XXème siècle, le manque de logements, les faibles coûts des
énergies de chauffage, combinés à un développement économique fort, conduit à la production de masse de logements bon marchés.
L’énergie était alors disponible en quantité et à des coûts très faibles. Dés lors la question de l’isolation était superflue. Ne répondant à aucune pression économique, l’isolation des logements était simplement ignorée.
En 1973, le premier choc pétrolier de l’histoire, a été une prise de conscience douloureuse, on sait désormais que le pétrole n’est pas une ressource inépuisable. Le prix des produits pétroliers ne s’arrêtant de croitre, l’économie d’énergie apparait vite comme une préoccupation majeure. En 1974, seulement un an après le choc pétrolier, la France se dote d’une réglementation thermique s’appliquant aux bâtiments de logements neufs. Cette première réglementation, comme les suivantes, fixe des consommations maximales et les réduits à chaque édition. L’efficacité de tels jalons a fini par porter ses fruits. Sur les trente années suivantes
la consommation énergétique du parc existant à diminué de 37.5%, faisant passer la consommation moyenne du logement de
400kWh/m²/an à moins de 250kWh/m²/an. Malgré ces avancées, la consommation d’énergie dans le bâtiment a augmenté de 25%. La principale raison de ce phénomène est l’accroissement de la surface moyenne, du nombre de logements et du nombre de bâtiments tertiaires. Cette augmentation est renforcée par le développement du confort sous formes d’équipement électroménager et de climatisation.

Cependant aujourd’hui, le bâtiment reste le premier consommateur d’énergie, avec 46% de la consommation en France. Sur ce segment, l’habitat individuel représente 42%. Dans le secteur du bâtiment, le chauffage représente 70% de la consommation d’énergie. Ce qui en fait une cible privilégiée pour « la chasse au gaspi ». Depuis 1973, une autre problématique est apparue en plus de la diminution des ressources en énergie fossile: le changement climatique. L’impact de l’homme sur l’environnement n’est plus une hypothèse. Elle a été confirmée par la communauté scientifique internationale en 2007. La nécessité de maitriser l’émission de gaz à effet de serre pour limiter ce phénomène s’impose. Le secteur du bâtiment est le second émetteur de CO₂ et les constructions mal isolées en sont en grand partie responsables. Le but de cette optimisation est évidement de conserver un environnement et des conditions météorologiques les plus stables possibles.

 

Réglementation Thermique « Grenelle Environnement » 2012,
Un saut énergétique sans précédent.

En 1975 la réglementation thermique, a peu à peu renforcée les exigences en termes de consommation d’énergie et a depuis permise de diviser par deux la consommation énergétique des constructions neuves. Le grenelle de l’environnement prévoit une division par trois, d’ici 2012, de la consommation des bâtiments neufs. La consommation moyenne d’énergie primaire des constructions neuves passeraient de 150 kWhEP/m²/an à 50 kWhEP/m²/an en 2012. Jusqu’ici la réglementation thermique améliorait, tous les cinq ans, de 15 à 20% les performances du bâti. Le passage à 50 kWhEP/m²/an fixe un seuil ambitieux qui permettra à termes le passage, pour 2020, à l’énergie positive. La « Réglementation Thermique (RT) Grenelle Environnement 2012 » remplacera la réglementation actuelle « RT 2005 » Sous l’égide de la Direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature d’une part et de la Direction générale de l’énergie et du climat d’autre part, 12 groupes de travail thématiques, composés de bureaux d’études thermiques et de centres techniques, travaillent à la rédaction des exigences précises de la future réglementation thermique. La Réglementation Thermique 2012 s’articule autour de trois exigences :
‐Une exigence d’efficacité énergétique minimale du bâti : le Besoin bioclimatique ou « Bbiomax » La loi prévoit ce seuil garantissant la qualité de conception du bâti. Le Bbio impose une exigence d’efficacité énergétique du bâti, prenant en compte les apports solaires et lumineux, il complétera le seuil de consommations (50kWk/m²/an),de façon à encourager la conception bioclimatique. Limitant le besoin en énergie pour les composantes liées à la conception du bâti (chauffage, refroidissement et éclairage), cette exigence encourage l’optimisation du bâti indépendamment de tous systèmes énergétiques misent en oeuvre. Le Bbio privilégie le niveau d’isolation, les mitoyennetés et la conception bioclimatique (accès à l’éclairage naturel, aux apports solaires, en maximisant les
surfaces vitrées bien orientées). Il remplace le coefficient « Ubât » (coef. de transmission surfacique moyenne de l’enveloppe) présent dans la RT 2005 et qui prenait en compte uniquement le niveau d’isolation du bâti. La Réglementation Thermique « Grenelle Environnement 2012 » introduit un indicateur évaluant les qualités intrinsèques de la conception du bâtiment. La valeur moyenne du Bbiomax est modulée selon la localisation, l’altitude, les activités abritées par le bâtiment et pour l’habitat individuel, la surface habitable.
‐Une exigence de Consommation maximale d’énergie primaire : le « Cmax » Cet aspect porte sur 5 postes de consommation d’énergie : le chauffage, la production d’eau chaude, l’éclairage, le refroidissement et les auxiliaires (ventilations, pompes…). La consommation énergétique devra passer en dessous d’un seuil de 50kWhEP/m²/an modulé soit à peu près, le niveau actuel du label BBCEffinergie.
La RT 2012 précise que les consommations doivent être mesurées en énergie primaire, pour tenir compte des consommations énergétiques de l’ensemble du processus de production, de transport et de distribution d’énergie. Pour cela le « Cmax » est modulé selon la localisation, l’altitude, les activités abritées par le bâtiment et pour l’habitat individuel, la surface habitable et les émissions de gaz à effet de serre.
‐L’exigence de confort d’été dans les bâtiments non climatisés Comme dans la RT 2005, la RT 2012 définit des catégories de bâtiment dans lesquels il est possible d’obtenir un bon niveau de confort en été sans avoir à recourir à un système actif de refroidissement. Ces catégories (CE1 et CE2) dépendent du type d’occupation et de la location (zone climatique, altitude, proximité de zones de
bruit). Elle vise à limiter le développement des climatiseurs. De plus, des exigences de moyens devraient être rendues obligatoires, comme des mesures de la perméabilité à l’air lors de la construction, assurant la qualité de la mise en oeuvre. La RT 2012 devrait positionner la France comme un leader Européen, en réduisant les consommations d’énergie et d’émission de CO₂. L’économie ainsi réalisée pour les foyers représente une augmentation directe du pouvoir d’achat des français. Elle devrait également dynamiser les entreprises de construction, les industriels et les équipementiers sur les marchés à haute valeur ajoutée.

Simulation avec les matériaux choisis, face à la RT 2012

Dans cette mise en situation, nous allons comparer différents modèles de bâtiments auxquels
seront appliqués les différents isolants. Les calculs seront basés sur des bâtiments dont le volume sera défini
par :
‐Surfaces de plancher : 300 m²
‐Hauteur entre planchers : 3 m
Ce qui implique un volume constant de 900 m³.
Sur cette base, huit bâtiments sont définis et comparés à un neuvième qui sert de référence. Dans un
premier temps, les surfaces des enveloppes des volumes sont comparées, car elles définissent les surfaces d’échanges. Il est alors possible de comprendre que certaines formes de bâtiment sont intrinsèquement plus performantes que d’autre, thermiquement et économiquement.

Thermiquement : en limitant le rapport, surface d’enveloppe/volume bâti, on limite les surfaces de
déperdition.
Économiquement : en limitant ce rapport la surface à isoler représente un coût moins important.

Le tableau suivant met en évidence que les formes étalées ou comportant des excroissances sont pénalisées par des surfaces d’enveloppe plus importantes. A l’inverse, les modèles plus compacts bénéficient de surfaces de déperdition moindre.


Les exigences de la RT « Grenelle Environnement » 2012 se rapprochent des standards du label
BBC‐Effinergie. Pour simplifier la démarche de calcul, je m’appuierai sur le protocole de calcul proposé par le guide Effinergie « réussir un projet de Bâtiment Basse Consommation ». Ce guide propose des fourchettes de résistance thermique pour les parois opaques. Afin de clarifier la démarche des calculs, les parois des modèles seront considérées comme uniquement constituées d’isolant, et il est fait abstraction des ouvertures. Le but de ce comparatif est d’appréhender la relation entre le volume du bâti et les épaisseurs d’isolant réclamé pour obtenir les mêmes performances, et non pas de constituer un document de pré-dimensionnement.
Le calcul est fait avec les valeurs moyennes du λ* de chaque matériau isolant abordé, et avec les résistances moyennes proposées par le guide Effinergie, pour les toits, les murs et les sols sur ter‐plain. Cela en considérant une température intérieur de 20°C et une température extérieur de ‐10°C.

 

Les tableaux précédents nous permettent de comparer l’efficacité de chacun des matériaux. Et s’il
en ressort que le polyuréthane est très performent tandis que la ouate de cellulose l’est bien moins, on remarquera surtout qu’il y a peu de différences entre les autres matériaux. De plus, il est probable que pour obtenir les différentes épaisseurs, le conditionnement des produits commercialisé imposeront des surépaisseurs. Ces surépaisseurs contribuent à homogénéiser ces matériaux.
Ces tableaux présentaient les épaisseurs des différents matériaux pour un même bâtiment, et nous
permettaient de comparer la performance de chacun des isolants. Le graphique suivant propose une lecture transversale des tableaux. Et compare les épaisseurs nécessaires d’un même isolant pour les différents bâtiments donnés.


Lorsque l’on compare les différents modèles pour un seul des matériaux abordé, il apparait que la
conception du bâti influence grandement ces performances thermiques. Tandis que, lors de la comparaison des différents matériaux pour un même modèle, les écarts d’épaisseurs sont relativement réduits. Cela indique clairement que le choix de l’isolant est secondaire par rapports au volume du bâti, face à son comportement thermique.
On voit bien ici que ce sont les bâtiments en rez‐de‐chaussée, qui en plus de souffrir de leur manque de compacité, présentent de grandes surfaces de toitures et sont les moins favorables (Résistance
superficielle : 0.14). D’un point de vue économique, ces bâtiments sont doublement pénalisés, car
l’épaisseur d’isolation pour ces grandes surfaces doit être bien plus importante. En effet, des bâtiments plus compacts présentent deux à trois fois moins d’épaisseur d’isolant en toitures.
Lors de la conception, le fait de privilégier un type de matériaux d’isolation plutôt qu’un autre sera
rarement imposé par des critères techniques, et relèvera d’avantage des critères économiques. En effet, tous les isolants présentés précédemment ont des caractéristiques thermiques relativement proches. Le temps aidant et la technique se généralisant, on peut imaginer que les résistances thermiques des matériaux d’isolation renouvelable s’amélioreront. Et devant l’impact énergétique de certains matériaux de synthèse, l’intérêt porté ces dernières années à des isolants plus sobres devrait encourager leur développement et favoriser l’abaissement de leurs coûts de production. Cela devrait encore homogénéiser les performances des isolants disponibles.
La performance thermique d’un bâtiment est alors principalement définie par sa géométrie et son
adaptation à son environnement. La prise en compte des besoins énergétiques d’un bâtiment devra être anticipée dés l’étape de l’esquisse, ainsi on devrait éviter des surcoûts liés aux sur‐épaisseurs d’isolants imposés par une géométrie trop peu compacte.
Le concepteur est responsable de l’efficacité de son bâtiment et ne pourra plus entièrement se reposer sur l’isolation pour satisfaire aux exigences thermiques. Alors qu’en accordant une attention particulière au volume bâti et à son environnement, il est possible de développer des stratégies permettant de lui conférer des caractéristiques intrinsèques, indépendantes du type d’isolation choisi. Cela permettrait de diminuer :
le prix du bâtiment, la facture énergétique lors de son fonctionnement et l’empreinte carbone du bâtiment.
La démarche de conception s’enrichit de préoccupations techniques. C’est au concepteur de faire preuve d’ingéniosité afin de ne pas subir les critères imposés par la législation.
Si la réglementation prévoie pour 2012 de généraliser le niveau de performance des Bâtiments
Base Consommation à l’ensemble de la construction neuve, cela n’est qu’une étape de plus, qui
doit permettre d’atteindre en 2020 la généralisation des bâtiments à énergie positive. L’ambition
de cet objectif doit être vue comme une opportunité pour les concepteurs de bâtiments de
renouveler leurs approches face à un projet.

 

ENSACF
05/2011
Etudiant : A. DELAY
Enseignant : J.B. VIALE

 

Glossaire

Énergie grise : représente la consommation d’énergie nécessaire à : l’extraction et le transport de matière
premier, transformation des matières et fabrication du produit, commercialisation, mise en oeuvre et pour
finir son recyclage.
Sarking : procédé assurant l’isolation thermique des toitures inclinées par la pose de panneau rigide audessus
des chevrons.
Déphasage : phénomène de retard entre la variation de la température intérieur et extérieur.
Ex : pour une paroi lourde non isolée, s’il fait froid à l’extérieur, il faudra un certain temps pour que la paroi
absorbe du froid, le stocke et le restitue à l’intérieur.

 

Bibliographie :

Centre d’assistance technique et de documentation, les isolants thermiques, Paris, publication du moniteur,
1983,191 p.
Jean‐Pierre Oliva, l’isolation écologique : conception, matériaux, mise en oeuvre, Mens, terre vivante, 2001,
238 p.
Samuel Courgey et Jean‐Pierre Olivia, la conception bioclimatique : des maisons confortable et économes,
Mens, 2006, 240 p.
Thierry Gallauziaux et David Fedullo, Le grand livre de l’isolation, Paris, Eyrolles, 2010, 683 p.
Jaques Kessler, René Bourgois et Henri Chauvel, Mémotech : génie des matériaux, Paris, Educalivre, 2001,
528 p.
Jean‐Louis BORLOO et Benoist APPARU : présentation de la Réglementation Thermique « grenelle
Environnement 2012 » (dossier de presse), Paris, Ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement
durable et de la mer, 6 juin 2010, 46 p.
Réussir un projet de Bâtiment Basse Consommation, des clés pour des logements neuf confortables et
économes en énergie, guide à destination des professionnels du bâtiment, Collectif effinergie, Paris, 2008,
36 p.
Arrêté du 26 octobre 2010 relatif aux caractéristiques thermiques et aux exigences de performances
énergétiques des bâtiments nouveaux et des parties nouvelles de bâtiments, Ministère de l’écologie, de
l’énergie, du développement durable et de la mer.
Au fil du bois, zoom technique, étanchéité à l’air, CAUE de l’Isère, 2009
Au fil du bois, portraits d’architectures.2, objectif passif !, CAUE de l’Isère, 2007

 

Webographie :

http://www.societechimiquedefrance.fr
Site de la Société Chimique de France, qui a pour vocation de rassembler toutes les personnes physiques ou
morales quel que soit leur secteur d’activité (publique ou privé) concernées par les sciences de la chimie et
leurs applications, et de promouvoir le rôle des sciences chimiques.
http://www.econologie.com
Source des documents officiels mise en ligne
http://www.euroactiv.fr
Site association de consommateurs
http://garonne.ac‐toulouse.fr/web_filiere_bois/
Portail officiel de la filière bois
http://www.development‐durable.gouv.fr
Ministère de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement
http://www.effinergie.org
Site de l’association, pour la promotion, la construction et la réhabilitation de bâtiment BBC